La pompe à chaleur en vaut-elle la chandelle ?

La pompe à chaleur s’impose progressivement comme une technologie familière via l’immobilier. Réputée comme la solution miracle pour se chauffer sans polluer ni dépenser mais onéreuse à l’achat, elle est poussée en avant par les législateurs. Par contre, peu de gens savent que le passage à la mobilité électrique la fait également entrer dans nos voitures. Du coup, concrètement, une “PAC”, c’est quoi ? Et surtout, est-ce vraiment utile ? Si oui, pour qui ? Explications.

Lorsqu’on envisage l’achat de quelque chose de complexe comme une PAC, il est difficile d’en connaître la pertinence en se renseignant auprès du vendeur, car on ne sait pas à qui on a affaire. Si le commercial est compétent techniquement et comprend parfaitement la machine, espèce rare mais ô combien précieuse, vous dira-t-il honnêtement si cela vous convient ou mentira-t-il pour vous la faire acheter même si ce n’est pas ce qu’il vous faut ? Si ses connaissances techniques sont limitées ou nulles mais qu’il est honnête, il pourra être sinon utile, du moins sympa. Enfin, si c’est un incompétent technique qui ne comprend pas ce qu’il vend mais qu’il essaie de cacher son ignorance, l’écouter patauger peut vous procurer une belle tranche de rigolade si vous-même avez les connaissances qui lui font défaut.

Tout ça pour dire qu’en fonction du vendeur en face de vous, il pourra vous affirmer que la PAC est absolument nécessaire ou totalement inutile sans que vous ne sachiez ce qui est vrai.

Une PAC, ça marche comment ?

Bref, revenons à nos moutons (pas ceux qui croient les commerciaux sans scrupule hein, juste notre sujet du jour). Vous entendez parler partout de cette fameuse PAC, mais peut-être sans savoir pourquoi c’est cool. Dans une voiture brûlant du carburant, le moteur thermique dégage de la chaleur en fonctionnant. Il est refroidi par le liquide de refroidissement, qui sera donc chaud en sortie du moteur. Lorsque vous mettez le chauffage et que votre moteur est à bonne température, une partie de ce liquide de refroidissement chaud passe dans un radiateur de chauffage. L’air extérieur passe par ce radiateur et est dirigé vers l’habitacle. C’est donc une chaleur “gratuite” car si pas utilisée elle est évacuée autrement, raison pour laquelle l’autonomie d’une voiture thermique ne baisse pas vraiment en hiver. Il y a seulement au début de votre trajet, lorsque votre moteur est froid et qu’il garde précieusement chaque calorie pour monter en température rapidement, qu’il faut produire de la chaleur en consommant de l’énergie. C’est fait via des résistances, alimentées en électricité par votre alternateur (lui-même entraîné par le moteur).

Dans une électrique, il y a beaucoup moins de chaleur sous le coude. Non pas que rien ne chauffe, la batterie, l’électronique et le moteur électrique dégagent de la chaleur et la gestion du refroidissement est très complexe. Mais la quantité de chaleur est dans des proportions bien moindre : comparez la taille des ouvertures de refroidissement dans le parechoc entre une thermique et une électrique pour vous en rendre compte. Il faut donc la produire en consommant de l’énergie via deux méthodes. Soit via de très énergivores résistances comme dans votre grille-pain ou votre radiateur électrique. Soit via une PAC. Celle-ci est en fait une climatisation réversible qui utilise un fluide frigorigène dans un circuit fermé. Les clim’ ont toutes une partie chaude (avec le compresseur) et une partie froide (avec le détendeur). La différence avec la clim’ standard où on utilise seulement la partie froide est que la partie chaude peut aussi être envoyée dans l’habitacle, d’où le terme “réversible”. 

Lorsque ce fluide frigorigène est comprimé par le compresseur, il devient gaz et chauffe, c’est physique. Pensez à votre pompe à vélo qui devient bouillante lorsque vous avez pompé comme un goret pour tenter de regonfler votre chambre à air alors qu’il y a toujours cette p***** d’épine dans le pneu. Le gaz chaud du circuit fermé est dirigé dans un radiateur, le condenseur : l’air extérieur passe à travers ce condenseur, prend la chaleur avec et est envoyé dans l’habitacle. Privé de sa chaleur, le fluide se refroidit, il redevient liquide et le cycle recommence. 

L’excellent rendement vient de l’utilisation de ce fluide frigorigène qui a besoin d’une température bien plus basse que l’air pour s’évaporer. La compression et transformation en gaz chaud ne consomme donc presque pas d’énergie (juste celle de l’entrainement du compresseur et des pompes faisant circuler le fluide) et même avec une température ambiante basse cela fonctionne. Les températures de fonctionnement idéales sont annoncées entre 20 et 0°C. 

Dans la réalité, ce circuit de climatisation intègre aussi le refroidissement de la batterie, de l’électronique et des composants, pour augmenter la température de base du fluide et gagner des calories gratuites.

Rentable et utile, ou pas ?

Ne sachant pas si cette PAC sert vraiment ou est plutôt un piège commercial, j’ai voulu vérifier par un petit raisonnement. Celui-ci est très approximatif, mais – s’il n’est pas complètement bête – peut donner une petite idée des profils de conducteurs pour qui elle est utile et/ou rentable.

Selon les études, un chauffage classique par résistances consommera entre 3 et 5kW à pleine puissance, puis entre 2 et 3kW une fois régulé. La PAC consommera en général 1,5kW à fond puis 0,5kW en stabilisé. En résumé, le chauffage standard consommera environ 3kWh par heure contre 0,5kWh par heure pour la PAC, soit une différence de 2,5kWh. Sur une semaine de trajet maison-travail si vous avez 1h de route (5 jours * 2 A/R * 1h = 10h), vous économiserez 25kWh (10h * 2,5kWh), donc 4,25€ si vous payez votre électricité 0,17€/kWh comme moi. Par an, sachant qu’il ne fait des températures froides qu’un tiers à une moitié d’année, visons large avec 25 semaines entre -5°C et 15°C extérieur, donc 250h sur la route pour le travail. En ajoutant les trajets vacances et week-end (ajoutons 70h, soit 1 aller-retour au ski de 20h, 1 aller-retour dans les Vosges de 10h, et un peu plus de 1,5h trajet/week-end), nous avons 320h. L’économie selon les hypothèses est de 136€ par an (320h * 2,5kWh/h * 0,17€). En 5 ans, c’est 680€. Adaptez cela à votre situation, mais seuls les gros rouleurs qui n’ont pas de panneaux solaires y trouverons leur compte du point de vue rentabilité si elle est en option, car le prix d’achat tourne entre 1000 et 1200€.

Mais souvent, on ne la prend pas pour être rentable, plutôt pour gagner en autonomie sur des longs trajets. Si vous réfléchissez en temps de charge gagné sur un trajet au ski par exemple, reprenons les 25kWh d’évités avec 10h de route. Si la voiture annonce 30min pour charger sa batterie de 10 à 80%, il faut multiplier la capacité utile par 70% pour avoir les kWh gagnés en 30min. Sur les clones du groupe VW ayant une batterie de 77kWh, cette charge de 10 à 80% représente 53,9kWh. Si on divise 53,9kWh par les 25kWh non-consommés, cela vous fait éviter 15min de charge sur 10h de route.

Il faut aussi prendre en compte les limites de la PAC. Déjà, elle n’a pas la rapidité d’une résistance pour réchauffer rapidement. De nombreux modèles utilisent donc un système hybride, où des résistances (incroyablement basiques et avec un rendement quasi parfait) sont ajoutées à la PAC pour le dégel du parebrise ou la chauffe rapide de l’habitacle au démarrage. De plus, son efficacité va fortement baisser par grands froids, quand les températures deviennent fortement négatives. Il arrive un point où les résistances obtiennent un meilleur rendement final que le circuit complexe de la PAC.

Tout ceci nuance fortement la nécessité du surcoût de la PAC. Si elle est de série, c’est tout bon. Si c’est en supplément, c’est à réfléchir. En bref, une pompe à chaleur peut être à envisager soit si vous faites de longs trajets hivernaux pour aller au travail, soit si vous allez souvent en vacances en voiture durant la saison fraiche/froide et que vous voulez aller le plus vite possible.

Note de l’auteur : des erreurs pourront certainement se glisser dans ces articles. Je m’y connais plus que certains et moins que d’autres, et je n’ai pas des heures à vérifier en détail chaque affirmation. Donc toute remarque, correction ou précision est fortement souhaitée. 

Audran Lernoux

Hyperactif multifonction intéressé par trop de choses. Surtout si elles ont des roues, des carres ou des pattes.