La tête dans le guidon

Remettre à jour un modèle qui se vend à la pelle, ça demande de prendre du recul.

Les petits, moyens et grands SUV, chez Peugeot, on connaît la recette du succès. Les 2008, 3008 et 5008 se vendent comme des petits pains depuis leur introduction il y a de ça une bonne dizaine d’années, et semblent traverser les restylages haut la main. Mais quand il s’agit de passer à une toute nouvelle génération, les ingénieurs de Sochaux se sont-ils assez creusé les méninges, ou sont-ils restés la tête dans le guidon ? Pour en avoir le cœur net, nous avons emmené un des potentiels best-sellers sur la plus grande course cycliste du monde.

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Quand on s’attaque aux cols mythiques des Alpes avec un SUV hybride signé Peugeot, on espère que ce dernier soit à la hauteur de sa réputation. La 3008, best-seller de la marque, s’offre une cure d’hybridation (ainsi qu’une gamme électrique, que nous avons déjà essayée chez sa grande sœur), avec une motorisation Puretech de 1.2l et 136 chevaux, assortie d’une petite assistance électrique. Mais est-ce suffisant pour gravir les sommets de la même manière que Jonas Vingegaard grimpe vers la victoire ? Attaquons quelques cols pour en juger.

Dès les premières rampes du Col du Lautaret, la 3008 Hybrid montre son jeu : la régénération électrique s’active dès qu’on lâche la pédale, récupérant de l’énergie à chaque freinage. L’idée est séduisante, surtout sur des parcours montagneux où les descentes peuvent être aussi longues que les montées sont raides. Les relances sont bonnes et le moulin ne pédale pas trop dans la semoule grâce au couple électrique. Il faut d’ailleurs directement passer en mode sport pour que la boîte rétrograde comme il le faut, sous peine de se retrouver dans une épingle en quatrième rapport. Un peu comme un grimpeur qui ne choisit pas le bon braquet, on pourrait se retrouver en difficulté si on ne prend pas les bonnes décisions en amont.

Les sommets, ça commence à nous connaître.

L’approche du Galibier, quant à elle, met à l’épreuve la stabilité et la tenue de route du véhicule. Les virages à 180°, les dénivelés abrupts, tout est là pour tester les capacités dynamiques de la 3008. On sent que le châssis fait de son mieux, aidé par un poids mieux contenu que sur la gamme non-thermique. C’est efficace, certes, mais pas forcément transcendant. Peut-être est-ce la limite des compromis nécessaires pour allier confort et dynamisme dans un même ensemble, comme un sprinteur qui se retrouve dans une échappée montagnarde, forcé de jouer un rôle pour lequel il n’est pas totalement fait.

Sur les pentes plus douces du Col de Vars, le confort prend le dessus. L’occasion idéale pour juger de l’habitabilité et des équipements à bord. Les sièges en cuir font leur effet, et l’insonorisation de l’habitacle est à saluer, surtout après les rugissements du Galibier. Les équipements intérieurs sont d’ailleurs le point d’orgue de cette nouvelle 3008, avec une planche bien finie, des écrans bien intégrés ainsi que quelques boutons (vous savez à quel point on aime les boutons). Mais on s’interroge : tout cet attirail de confort ne masque-t-il pas une certaine timidité sous le capot ? Le confort est là, mais la sensation d’isolement aussi, comme si la 3008 essayait un peu trop fort de nous protéger de la réalité du terrain, qui va très vite grimper à près de 3.000 m d’altitude, comme un peloton s’apprêtant à affronter une étape reine.

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En atteignant les sommets du Col de la Bonnette, l’un des plus hauts d’Europe, on attend de la 3008 qu’elle montre enfin ses muscles. Le moteur, bien que modeste, ne s’effondre pas sous l’effort, mais il ne brille pas non plus. La reprise en altitude est correcte, sans plus. Il faut avouer qu’on espérait un peu plus de punch dans ces conditions où la raréfaction de l’air met à mal les mécaniques thermiques. L’hybridation aide, bien sûr, mais elle ne transforme pas la 3008 en un foudre de guerre, tout comme une équipe de rouleurs ne devient pas miraculeusement une équipe de grimpeurs sur les pentes les plus sévères.

Enfin, la traversée du Col de la Cayolle nous ramène sur des terrains plus raisonnables. Ici, la gestion de l’énergie devient cruciale. Le système de freinage régénératif fait son job, rechargeant la batterie au fil des virages en lacets, mais il le fait même un peu trop vite. La batterie étant petite (hybridation légère oblige), le freinage moteur est parfois fort, parfois léger, dépendant du niveau de charge. Un peu comme Tadej Pogacar, on relance donc à fond en sortie de virage pour vider cette même batterie, et tenter de finir cette descente sans trop toucher aux freins.

À l’arrivée à Nice, on constate que cette 3008 Hybrid est un véhicule bien pensé pour ceux qui cherchent un compromis entre dynamisme, confort et efficacité énergétique (notre consommation moyenne mixte, mélangeant autoroute et cols de montagne s’est stabilisée à 6.9l/100km). Mais dans les cols alpins, là où l’âme d’un véhicule se révèle vraiment, il lui manque peut-être ce petit quelque chose qui transforme une bonne expérience en une grande aventure. À vous de décider si cela suffit à en faire votre compagnon de route pour affronter les plus hauts sommets, comme ces coureurs qui, chaque été, transforment ces mêmes routes en théâtre de légendes.

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